Nous sommes le samedi 14 septembre 2024, il est 23 heures passées et Pedro vient de sortir. Je décide de tirer au sort un album de sa liste à écouter pour m’occuper une petite heure, sans savoir que tout mon week-end allait prendre une tournure très différent.
Toute la discographie de Death est sur la liste et quand j’ai tiré au sort Human (1991), j’ai décidé de prendre quelques jours pour écouter toute la discographie.
J’ai commencé Scream Bloody Gore et j’ai tout de suite été happée par les cris de Chuck Schuldiner et la batterie déchaînée. J’ai enchaîné les albums sans me poser de question, spammant Pedro de messages à base de “AAAAAH” et “x chanson olalala”, des avis très pro donc. Il m’aura fallu au final moins de 24h pour tout écouter dans son entièreté.
Pedro est rentré vers 2 heures du matin quand je venais à peine d’entamer Human (1991). On s’est installé sur la table du salon et on a remis Human (1991) du début. Puis Individual Thought Patterns. On est finalement allés se coucher à 4 heures du matin, des riffs pleins la tête.
J’ai fini la discographie au réveil quelques heures plus tard. Et j’ai tout de suite su que j’écrirai cette article. Comme je l’ai écouté grâce et avec Pedro, c’était évident qu’il fallait qu’il participe ici aussi. Voici donc nos avis sur le groupe, les albums, et une tentative de classement: par un grand fan depuis des années et une petite fan depuis à peine 11 jours.
I. Death: le groupe
Pedro: Death est probablement mon groupe préféré de metal. Je ne trouve aucun album mauvais, aucune chanson mauvaise. Rien n'est à skip et honnêtement c'est rare pour moi avec un groupe qui a sorti 7 albums et autant évolué en 18 ans. Quasiment chaque année je réécoute toute leur discographie et je ne m'en lasse pas. C'est impensable pour moi de n'écouter qu'un seul album, je suis obligé de tout réécouter à chaque fois. Death, c'est un groupe intemporel à la fois à l'avance sur son temps et sur le death. C'est également ma plus grande tragédie dans la musique: je ne pourrai jamais voir Chuck jouer en live. J'ai eu la chance de voir Death To All formé par des anciens membres le 24 avril 2016, c'était une sacrée expérience et un de mes concerts préférés.
Steph: Mon tout premier souvenir de Death, et donc ma réelle introduction au groupe (hum, Chuck Schuldiner soyons honnête) ne remonte pas à il y a onze jours, mais il y a trois ans. Quelques mois avant qu’on se mette ensemble avec pedro, j’habitais chez mes parents et il m’a envoyé une chanson d’eux. Malheureusement je me souviens plus de quelle chanson, et je sais plus si j’ai fini par écouter tout un album — mais me connaissant je pense avoir écouté tout Scream Bloody Gore (1987). Je me souviens avoir eu un crush instantané sur Schuldiner, et envoyé des “oh wow, le cri dans x chanson, à x minute!!”. Les cris de Chuck m’avaient déjà conquise à l’époque.
Je m’y connais très peu en metal, et encore moins bien en death metal mais je peux voir en quoi ces albums sont des incontournables du genre. Mais j’avoue être décontenancée par tous les changements du line-up. J’ai l’habitude de suivre un groupe autant pour leur musique que pour les membres, et c’est difficile de faire ça avec Death. Des changements tous les albums, mais aussi pour chaque tournée, etc. C’est pas facile à suivre!
En tout cas c’est un groupe que je me vois réécouter régulièrement dans le futur, et je suis contente d’avoir pris le temps d’écouter leur son.
II. Death: les albums
Scream Bloody Gore (1987)
Pedro: Scream Bloody Gore (1987) c'est raw, c'est gore, et en plus c'est catchy ! Pour moi Chuck et ses compères ont enregistré là le premier album de death metal, celui qui définit plus clairement le son du genre pour les décennies à venir. Entre le chant qui vient d'outre-tombe (clairement dans mon top 3 des voix de death metal), les riffs bien sales, la batterie frénétique (merci Chris Reifert), les paroles sanglantes, les cris tranchants, tous les codes sont déjà là.
Fun fact: c'est Chuck qui joue les 2 guitares et la basse sur l'album et puis la cover est super cool. C'est l'OST d'un apéro avec des squelettes qui boivent du sang au fin fond d'une crypte
Steph: L’album que j’ai le plus réécouté pour l’instant — et je ne pense pas que ça changera. C’est cru et ça nous rentre dedans; les hurlements de Schuldiner me font frissonner et se promènent dans mes veines. Quand j’écoute SBG, je ne me retrouve jamais perdue dans mes pensées tant je suis investie par tout ce qu’il se passe. J’aurai rêvé de pouvoir voir cet album en particulier joué live.
TOP: Denial of Life; Mutilation et Torn to Pieces. Mais le début d’Evil Dead est top aussi. Et tout l’album, en fait.
Leprosy (1988)
Pedro: Si Scream Bloody Gore trempait ses pieds dans la marre de sang du death metal, Leprosy y saute à pieds joints et s'engloutit dedans. Entre la production encore plus propre, les riffs monstrueusement rapides, les breaks mid-tempo bien placés, les solos de guitar hero, toujours les cris mortels de Chuck... ma chose préférée dans cet album est le mixage de la batterie. Je le trouve absolument exquis, profond et bruyant mais juste ce qu'il faut; on dirait un coup de fusil à pompe.
Steph: Leprosy ne m’a pas autant convaincu que Scream Bloody Gore à la première écoute. Je l’avais aimé en soit mais rien n’était vraiment sorti du lot. Évidemment c’était la première écoute, ça. Depuis ça a bien changé. Chuck hurle toujours à la mort, même si ce sont des cris un peu différent. La batterie est folle et c’est ce qui m’a le plus touchée. Et les riffs d’Open Casket? Sign me up. C’est un deuxième album évidemment réussi, qui a du mordant mais qui manque un peu de la sauvagerie de SBG. Promis après ça j’arrête de tout comparer à SBG, c’est pas du jeu.
TOP:
Choke on It — Sa voix, les riffs… et son cri à 3:03 qui dure littéralement cinq secondes, on en parle???,
Forgotten Past,
et TOUT dans Primitive Ways.
Spiritual Healing (1990)
Pedro: Spiritual Healing, c'est la fin du death metal "pur et dur" des deux premiers albums et l'introduction d'éléments plus techniques et avant-gardistes qui seront de plus en plus prédominants par la suite. Même schéma pour les paroles, on s'éloigne du gore pour aller sur des réflexions plus philosophiques, sociétales ou sur la religion. Le groupe mature et ça nous met l'eau à la bouche pour la suite.
Steph: Living Monstrosity est une première chanson d’album parfaite. L’album m’a conquis dès les deux premières chansons. Les riffs sont plus techniques et il y a énormément de solos qui m’ont fait un bien fou. Du haut de ses 7min44, Spiritual Healing est une track qui sait nous entraîner du début à la fin. Altering Life est la première chanson où j’ai réellement fait attention aux paroles. Et les hurlements de Schuldiner tout le long de l’album… Faut en parler, c’est donc un:
TOP des cris de Chuck (sans ordre, et évidemment non exhaustif):
à 3:44 sur Defensive Personalities,
à 1:06 sur Within the mind (puis un autre plus tard dans la chanson, un plaisir)
à 2:54 sur Spiritual Healing
à la fin de Low life
La seule liste qui importe, en fait.
Human (1991)
Pedro: Sûrement mon line-up favori de death. Chuck en leader guitare/chant, Sean Reinert à la batterie, Paul Masvidal à la guitare et Steve Di Giorgio à la basse.
Di Giorgio est sûrement mon bassiste de metal préféré, voire préféré tout court. Comment ne pas aimer son style old school (cheveux longs, barbe, bandana, fringues metal) et son style de jeu si avant-gardiste pour du death metal? Points bonus pour jouer sans médiator. Double points bonus pour jouer sur des basses fretless. Triple points bonus pour ses basses fretless à 6 cordes. Je ne peux pas m'empêcher de sourire quand je l'entends slapper sa basse sur cet album. Grand merci à la production toujours excellente qui fait autant ressortir son jeu de basse.
Sean et Paul sont de très grosses pointures également, ayant formé le groupe de death progressif Cynic quelques années auparavant. Je sens une influence jazz qui s'immisce petit à petit dans l'instrumentation (grâce à eux ?) bref, c'est avant-gardiste, complexe, violent et pourtant extrêmement soigné, réfléchi. Chaque chanson fluctue énormément et je ne compte plus les frissons que m'ont donné cet album.
Je pourrai parler individuellement de chaque chanson pendant des heures. Cosmic Sea sort du lot pour être la seule track instrumentale ET quelle instru putain ! Un véritable alien au milieu de ce déferlement sonore. À partir de cet album et jusqu'au dernier je trouve qu'on atteint la culmination de Death en tant qu'entité musicale. Chaque track est juste incroyable sur tous les niveaux.
En 2 mots, cet album est un chef d'œuvre intemporel de musique; on est parmi les plus grands.
Steph: Human est le mélange parfait des deux derniers albums: des riffs à foison, une batterie qui sort de nouveau du lot, des solos à tout va et quelques cris bien amenés de Schuldiner. Cosmic Sea et Vacant Planets sont le combo parfait. C’est possible que j’ai d’avantage apprécié cet album parce que je l’ai écouté pour la première fois avec Pedro, et qu’il a pu mettre en avant quelques parties et des sons que je n’aurais pas particulièrement remarquée seule. Mais maintenant que j’entends tout ça, je pourrais l’écouter en boucle.
Impossible de parler de Human sans parler de Cosmic Sea d’ailleurs, la seule track instrumentale comme l’a souligné Pedro avant. Ils contrôlent le temps: les notes languissent puis se précipitent; une distortion qui montre que la musique ce n’est pas que le temps, mais l’espace aussi. Des notes qui se promènent et prennent une autre dimension. Ils sont forts.
Bref, un coup de cœur.
Individual Thought Patterns (1993)
Pedro: Cette fois, Chuck s'allie au guitariste Andy LaRocque de King Diamond, garde Di Giorgio à la basse et recrute Gene Hoglan, batteur légendaire d'un tas de groupes de death metal. Toujours un plaisir d'entendre si distinctement les slaps, les montées, descentes et lignes de basse (j'ai déjà dit à quel point j'admire son jeu de bassiste ?). Et le solo de basse sur the philosopher MAMMA MIA ! Pourquoi ont-ils décidé de le mettre en plein decrescendo final, ça me bute...
Sinon à part la basse, les riffs sont encore plus mélodieux, plus progressifs, les guitares s'entrechoquent, sont plus émotives, se répondent l'une et l'autre. L'ajout d'un synthé rend l'instant plus dramatique (refrain de mentally blind par exemple), certes il est peu présent sur l'album, mais c'est une bonne touche (synthé, touche, vous l'avez ?). Et puis la batterie à 2:50 sur Out Of Touch c'est du reggaeton et je suis sur le cul à quel point ça passe si bien dans la track. Death est toujours au sommet de son art, intouchable.
Steph: J’ai du mal à trouver quoi ajouter à ce qu’a déjà dit Pedro honnêtement. On sent des riffs plus mélodieux et un album plus émotif dans l’ensemble. J’ai bien aimé l’ajout du synthé, et je trouve que cet album est bon — malheureusement je n’ai pas été aussi touchée qu’avec d’autres de leurs albums. Il me manque… quelque chose? Et je saurai pas mettre la main sur quoi exactement. Plus de laisser aller? De cru? De nuances? Je sais pas. Mais ça reste du Death, donc du bon quoiqu’il arrive.
Ma chanson préférée de l’album est de loin Trapped in a Corner. J’aime aussi beaucoup In Human Form et The Philosopher, évidemment.
Symbolic (1995)
Pedro: Nouveau changement dans la voix, le premier gros changement depuis la fin des growl caverneux du début. Des cris un peu plus aigus, plus perçants, plus humains et surtout moins monstrueux. De plus en plus mélodique et jazzy, c'est avec un nouveau line-up (adieu Steve Di Giorgio…) que Death revient. Les chansons sont encore plus catchy qu'avant, malgré ce haut degré d'expérimentation: on dirait du death metal déstructuré par moments, les guitares commencent timidement à jouer sur leur son clair. Ça se détache complètement des autres groupes du style (ce passage vers 2:50 dans Without Judgement, damn ! Et la guitare acoustique à la fin de Crystal Mountain et de Perennial Quest, wow !).
C'est un album extrêmement fun, technique et gratifiant à jouer à la guitare. J'ai pu beaucoup analyser la structure des morceaux et des riffs de cette manière il y a quelques années. Il en est de même pour le prochain, The Sound of Perseverance. Death ne déçoit pas.
Steph: Symbolic (la chanson) est un sacré début d’album. Ça secoue et ça en dit long sur ce qui nous attends. Et Pedro a raison, le passage vers 2:50 dans Without Judgement est magique.
Symbolic est un album fluide que je réécoute avec plaisir. Les instruments vendent du rêve et je finis toujours par resserrer mon casque un peu plus contre mes oreilles pour me focaliser sur certains passages. La technique et le fun sont là, je ne peux pas le nier!
J’aime particulièrement Symbolic, Empty Words et Perennial Quest — qui est une dernière chanson parfaite.
The Sound of Perseverance (1998)
Pedro: Mon album préféré: entre les cris grinçants, perçants de Chuck proches du black metal, les chansons qui accélèrent, décélèrent et changent totalement de style sans prévenir, les solos jazzy doom louches dissonants en plein milieu des chansons...
Incroyablement cool et jazzy, c'est l'album le plus complexe, le plus technique et le plus progressif du groupe. J'ose à peine appeler ça du death metal par moment: ça transcende tout ce qu'on connait.
Voice of the Soul est magnifique. Je trouve ça fou d'avoir mis une balade de guitares acoustiques en plein milieu de l'album mais en même temps ça passe si bien. Les chansons sont plus longues et évoluent énormément, ce sont de vraies histoires instrumentales qui nous sont racontées (et je ne mentionne pas les paroles). Je ne compte pas les heures que j'ai passées à apprendre l'album entier à la guitare !
Cet album est un putain de chef d'œuvre encore une fois sur tous les points: sur chaque chanson, chaque riff, chaque solo, chaque break, chaque ligne de basse, chaque seconde.
Steph: L’avis de Pedro, me donne envie de réécouter cet album avec lui. Comme pour tous les albums: The Sound of Perseverance est une très bon album. Rien de nouveau dans ce sens là, vraiment. Pas un seul flop de la part de Death.
Le format un peu plus long de chaque chanson (sur les neuf chansons seulement deux durent moins de 5 minutes!) permet une plus grande évolution au sein même de la track, et Death nous emmènent avec eux. J’aime énormément ce genre de musique, où on sent l’artiste/le groupe nous embarquer ailleurs.
Je ressens moins d’engouement que Pedro, mais j’ai un sourire aux lèvres, la tête qui bouge et des frissons tout le long de l’écoute. Et c’est tout ce qui compte, merci Death!
TOP:
- Scavenger of Human Sorrow,
- Story to Tell,
- Voice of the Soul et
- Painkiller
III. Death: le classement
C’est marrant de voir cette disparité au final entre nous. Human, l’album du milieu de leur carrière, nous met tous les deux d’accord. Autrement j’ai clairement un penchant pour les débuts de Death et Pedro pour la fin de Death. Que ça se voit aussi clairement est amusant! Mais je pense que je peux parler pour nous deux avec confiance: Death n’en loupe pas une, et quitte à écouter un album, on les écoutera tous à la place.
Et après bientôt deux semaines aux côtés de Death, la première édition de Discography se termine! On reviendra avec d’autres groupes et/ou artiste, parfois avec Pedro, parfois juste moi (selon le groupe/l’artiste; je vais pas lui faire écouter tous les albums de Taylor Swift ou de BTS… à moins que?). J’ai quelques idées des prochains épisodes, notamment King Gizzard and the Lizard Wizard, Sun Ra, The Microphones ou encore Fleetwood Mac. Mais rien n’est décidé encore! Je pense essayé de sortir un volume de Discography par mois! Histoire de me laisser le temps de bien me plonger dans les albums.
On se retrouve vendredi (27.09) pour le deuxième volume de Radio Pedro. Le premier est juste là si vous l’avez raté. Et lundi (30.09) pour le troisième volume (déjà!) de StephFM. Bonne semaine et bonne écoute !